Côte d’Ivoire : Crise énergétique, pénurie d’eau dans certains quartiers

Un cocktail qui pourrait être explosif. En plus de la crise énergétique à laquelle elle fait face depuis quelques semaines, la Côte d’Ivoire est confrontée à une pénurie d’eau potable dans certaines villes de l’intérieur et dans des quartiers du district d’Abidjan. Comme si la nature prenait un malin plaisir à corser la situation déjà difficile pour les ménages et entreprises.

Mardi 4 mai 2018. Première poussée de fièvre. Dans la commune d’Abobo, précisément au PK 18, des populations manifestent leur mécontentement sur le boulevard Mohammed VI. Et pour cause, l’eau ne coule plus dans leurs robinets depuis près de trois semaines. Selon un manifestant, pour avoir de l’eau, les habitants de ce quartier sont obligés de se tourner vers les vendeurs ambulants pour acheter le bidon de 20 litres d’eau à 100 FCFA. Pour les familles nombreuses, cela pèse lourd dans le budget.

Même si des responsables de la société de distribution d’eau (SODECI), lors d’une rencontre avec les populations quelques jours plus tard, expliquent cette pénurie d’eau par la fraude sur le réseau, il n’en demeure pas moins que plusieurs quartiers du district d’Abidjan et des villes de l’intérieur souffrent du manque d’eau. A Yopougon cité CIE, Aboboté, Abobo Avocatier, Bonoua, Duékoué et bien d’autres localités du pays, le précieux liquide se fait rare dans les robinets. A cette pénurie s’ajoutent les coupures intempestives d’électricité que subissent les populations.

Longtemps restée silencieuse sur la question, la Compagne ivoirienne d’électricité (CIE) explique ces perturbations dans la distribution du courant par des incidents sur le réseau haute tension interconnecté. « Dans les conditions climatiques actuelles de fortes chaleurs, ces perturbations sont notamment liées à des dysfonctionnements observés sur certaines lignes d’interconnexion avec les pays frontaliers », indique le communiqué en date du  14 avril 2021.

Les Ivoiriens en sont à cette version quand dans la nuit du 20 au 21 avril une panne technique survient à centrale thermique d’Azito qui aggrave le déficit électrique que vit la Côte d’Ivoire. A l’issue de sa visite à la centrale le 23 avril, le ministre des Mines, du Pétrole et de l’Energie Thomas Camara rassure que la quatrième turbine de la centrale en construction sera opérationnelle e août 2021. « Elle permettra de régler définitivement tous les incidents que nous rencontrons », promet-il.

Entre-temps, le pays du cacao continue de jouer de malchance avec l’assèchement des lacs de ses différents barrages hydro-électriques à cause du réchauffement climatique.

« Tontine électrique »

Pour faire face à la crise énergétique, la CIE met en place un plan de rationnement de l’électricité. S’ensuit une guerre de terminologies. Si les nombreuses coupures d’électricité incitent à qualifier la situation de délestage, le gouvernement lui n’est pas de cet avis. « Il s’agit d’une situation de rationnement et non d’un délestage (…) Ce n’est que conjoncturel. Selon nos prévisions, nous devons avoir un retour à la normale dans deux mois, c’est-à-dire au mois de juillet et nous retrouverons complétement notre équilibre. Ce n’est donc pas un problème structurel. C’est un problème conjoncturel dû à une série d’incidents que nous avons eus et à l’utilisation de l’électricité hydraulique », relève le ministre Thomas Camara. Qu’à cela ne tienne, le pays est en plein rationnement de l’électricité. Le programme de la Compagnie ivoirienne d’électricité prévoit des coupures quotidiennes de 6 heures. Notamment entre 6h-12h ou 12h-18h. Ces plages horaires sont alternées d’une semaine à l’autre en fonction des quartiers. Une situation que les Ivoiriens, avec leur humour habituel, qualifient de « tontine électrique ».

Un plan de délestage de 145 grandes entreprises industrielles a également été mis en œuvre. Opérationnel depuis le 21 avril 2021, ce délestage (du moins ce rationnement) consiste à alimenter ces entreprises en électricité de façon alternée pendant 12 heures sur une plage de 48 heures. Cela n’est pas sans conséquences.

Flambée des prix

On assiste ainsi à une flambée des prix de certains produits dont le pain, la viande, le ciment… « La préoccupation majeure que nous vivons aujourd’hui  est liée  à la crise énergétique. Toute la Côte d’Ivoire vit cette situation, nous les cimentiers également. Elle est difficile et nous oblige à réduire nos potentiels de production. Ce qui a des conséquences sur la disponibilité du ciment et partant  sur les prix qui ont eu tendance à flamber mais je voudrais  rassurer que  ce soit les prix sortie usine, chez  les distributeurs et revendeurs, nous sommes dans le plafond fixé par le ministre du Commerce », a fait savoir Soro Nangolo, Dg de la Société de ciment d’Abidjan, lors d’une visite du ministre du Commerce et de l’Industrie, Souleymane Diarrassouba, dans cette cimenterie pour s’assurer de l’application des nouveaux prix fixés de manière consensuelle.

En effet, les négociations avec les industriels du ciment ont permis d’aboutir à des prix qui tiennent compte de leurs  contraintes et du pouvoir d’achat des populations. Ainsi la tonne du ciment CPJ45  cédée par les revendeurs à 120.000 ou 130000 FCFA du fait de la crise énergétique, a été ramenée lors des discussions à 90.000 FCFA. Sur le terrain, le ministre du Commerce et de l’Industrie a pu constater avec plaisir que  dans certains réseaux, en raison de la concurrence entre les acteurs, la tonne du ciment soit vendue à 85000 ou 86000 FCFA.

Toutefois dans les marchés, le prix de certaines denrées de première nécessité est toujours en hausse à l’instar du kilo de viande qui atteint aisément 3000 FCFA.  Au grand déplaisir des populations. Celles-ci ont désormais le regard fixé vers le ciel dans l’attente des premières pluies qui vont remplir les lacs des différents barrages hydro-électriques de la Côte d’Ivoire.


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